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Communiqué de presse de CDP-Enfance du 8 Juillet 2025

​L'association CDP-Enfance a engagé trois actions juridiques conjointes suite au décès de Lily, adolescente de 15 ans placée sous la protection du service de l’Aide sociale à l'enfance (ASE), et retrouvée décédée le 25 janvier 2024 dans une chambre d’hôtel à Aubière (Puy-de-Dôme).

 

UNE MORT ANNONCÉE PAR LES DYSFONCTIONNEMENTS INSTITUTIONNELS

​Ce décès illustre les défaillances du système français de protection de l'enfance que CDP-Enfance dénonce depuis des années.

​Des violations flagrantes de la loi : Le placement dans un établissement hôtelier de Lily était doublement illégal. Sa durée de 5 mois dépassait largement les 2 mois maximum autorisés par la loi Taquet du 7 février 2022. Par ailleurs, à 15 ans, elle ne respectait pas la limite d'âge minimum de 16 ans fixée par le décret publié quelques jours après son décès.

​Des conditions d'hébergement indignes : L'établissement présentait des carences majeures dans l'accompagnement des jeunes vulnérables et ne justifiait d’aucun agrément pour héberger des mineurs : absence totale de personnel éducatif qualifié, encadrement limité à un veilleur de nuit et un gérant sans formation spécialisée en protection de l'enfance. Pire encore, des signalements concernant le comportement inapproprié du gérant envers les professionnelles avaient été effectués dès juillet 2022, sans qu'aucune mesure ne soit prise.  

​Des signaux d'alarme négligés : La vulnérabilité extrême de Lily était pourtant manifeste et documentée. Elle multipliait les fugues et les équipes éducatives soupçonnaient une relation "toxique" avec un adulte d'une vingtaine d'années, redoutant qu'elle soit victime de prostitution. Ces indices graves, qui auraient dû déclencher une protection renforcée et des signalements judiciaires obligatoires selon les articles 434-1 et 434-3 du Code pénal, n'ont donné lieu à aucune mesure adaptée.

 

TROIS ACTIONS POUR FAIRE CESSER L'IMPUNITÉ

​Face à cette faillite institutionnelle, CDP-Enfance engage trois actions juridiques distinctes, devant 3 juridictions différentes, tellement le droit actuel est opaque pour faire juger la responsabilité des acteurs publics dans ces drames concernant des enfants placés à l’ASE :

​1. Action en responsabilité contre l'État pour fonctionnement défectueux du service public de la justice (rappelons que la France a déjà été condamnée à plusieurs reprises par la Cour Européenne des Droits de l’Homme pour ne pas avoir protégé des mineurs)

​2. Action contre le département du Puy-de-Dôme pour contester la légalité du placement de Lily. En effet, le Département a bafoué toutes les dispositions du Code de l’Action Sociale et des familles : pas d’agrément ni d’habilitation ni même de convention pour cet établissement accueillant des mineurs confiés à l’ASE.

​3. Saisine du Procureur de la République pour mise en danger de la vie d'autrui à l’encontre du Président du Conseil départemental.

 

L'URGENCE D'AGIR

​Le placement dans des hôtels de mineurs de l’ASE n'est pas le fruit du hasard mais résulte de choix politiques délibérés privilégiant l'économie budgétaire et une « libéralisation » de l’accueil des enfants à leur protection effective.

​Il ne peut plus être toléré qu'à l'heure d'une prise de conscience sociétale des dysfonctionnements dans la protection des enfants, les pouvoirs publics persistent dans leur inaction et leur négligence, et que les Départements puissent en toute impunité ignorer leurs obligations légales.

​Ces actions juridiques visent à faire reconnaître que la mort de Lily n'est pas un "accident" mais le résultat prévisible et évitable de manquements graves aux obligations légales de protection de l'enfance. Il s’agit surtout d’un enjeu démocratique : la reconnaissance de l’intérêt à agir d’une association de défense des enfants, lorsque ceux-ci n’ont pas de représentants légaux mobilisables. Un contre-pouvoir est indispensable afin de mettre fin à cette insupportable irresponsabilité de fait des acteurs institutionnels.

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                                                     Pascal CUSSIGH

                                                             Président de CDP-Enfance 

CDP-Enfance, Comprendre Défendre Protéger l'Enfance 9 juillet 2025
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