Mediapart enquête sur les dérives des experts psychiatres de l’institution judiciaire

Mediapart enquête sur les dérives des experts psychiatres de l’institution judiciaire

Mediapart enquête sur les dérives des experts psychiatres de l’institution judiciaire

Les journalistes de Médiapart Hugo Lemonier et Marine Turchi ont publié un article dénonçant les méthodes des experts psychiatres missionnés par la justice. Ces expertises, mal rémunérées, n’attirent que peu de candidats. En conséquence ces experts sont finalement nombreux à ne pas être suffisamment formés à déceler les conséquences psychologiques des violences sexuelles et font parfois preuve d’un sexisme latant ou d’un manque de professionnalisme grave.

Le phénomène n’est pas nouveau et CDP-Enfance, accompagnée de trois autres associations de la protection de l’enfance avait déjà adressé une requête au Conseil national de l’Ordre des médecins et au parquet général de la cour d’appel de Versailles en avril 2022, concernant l’expert psychiatre Paul Bensussan. Ce dernier est la figure de proue en France du “syndrome de l’aliénation parentale”, une théorie non reconnue par la communauté scientifique internationale, qui suppose que l’enfant dénonçant des actes incestueux ou de violence tiendrait un discours de dénigrement injustifié sous l’influence d’un parent (le plus souvent la mère) contre l’autre parent. Une invention qu’il utilise néanmoins fréquemment lors de ces expertises quitte à faire preuve de manquements professionnels : Paul Bensussan ayant conclu dans plusieurs affaires à une forme d’”aliénation mentale” après seulement une vingtaine de minutes d’entretien avec les plaignants. Cette requête n’a néanmoins pas eu de suite de la part de l’Ordre des médecins, permettant à Paul Bensussan de continuer ses expertises, bien qu’il soit aujourd’hui visé par une nouvelle plainte déontologique pour avoir réalisé un examen privé à la demande d’un père accusé d’inceste.

Paul Bensussan n’est pas le seul expert à poser question sur ses méthodes et sur ses conclusions. Il est indispensable aujourd’hui de lever le voile sur ces dérives car le poids des expertises psychiatriques et psychologiques dans les procédures judiciaires est souvent décisif. Pascal Cussigh, président de CDP-Enfance, a été interviewé par les deux journalistes de Mediapart. Il précise dans l’article qu’« il est très, très compliqué de contester une expertise. Il y a souvent des contentieux sur ce que l’expert fait dire aux personnes expertisées, qu’il s’agisse de mineures ou de majeures. Et, lorsqu’on se retrouve devant le juge, c’est systématiquement la parole de l’expert qui prime. »

Même en cas de manquements « manifestes » de la part de l’expert, « le juge ne va pas pour autant dire que l’expertise est nulle, il va seulement en ordonner une nouvelle. On affiche des beaux principes de contradictoire, sauf qu’en pratique, il ne s’applique pas”.

Obtenir des expertises psychiatriques fiables doit désormais être une priorité afin de permettre aux victimes d’obtenir protection et justice. Aujourd’hui, CDP-Enfance élabore avec des professionnel·les une série de recommandations pour encadrer les expertises psychiatriques. L’association souhaite que les expertises fassent l’objet d’un enregistrement audiovisuel, comme on le fait pour les auditions d’enfants dans le cadre d’une enquête pénale. Ainsi, les parties pourraient demander le visionnage de l’entretien auprès du juge, en cas de contestations sur les retranscriptions. Notre association espère que la Commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants (Ciivise) reprendra cette proposition.

Pour lire l’article de Médiapart, c’est par ici

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