Affaire Peyrard : un très long silence de cathédrale – France 3 Auvergne-Rhône-Alpes
0 CommentsLe père Régis Peyrard comparaîtra devant le tribunal de St Etienne en novembre prochain pour agressions sexuelles sur mineurs. Entre la discrétion de l’Eglise et l’inertie de la justice, le prêtre a pu échapper jusque là aux poursuites alors que les premières plaintes datent des années 2000.
Par Ph. Bette avec l’enquête de Sylvie Cozzolino
La scène se déroule lundi matin à la gendarmerie de St Etienne. Une quinzaine de personnes, tous des hommes, ont répondu à la convocation. Un enquêteur leur fait alors cette surprenante annonce : Le père Régis Peyrard est cité à comparaître le 20 novembre prochain devant le tribunal correctionnel de St Etienne dans une affaire de pédophilie .
On leur explique alors qu’il n’y aura ni enquête, ni juge d’instruction mais bien un procès. Une plainte pour abus sexuel déposée en 2001, encore non prescrite, a relancé la machine judiciaire. Tous connaissent le prêtre pour avoir été victimes de ses agissements entre les années 70 et 90. Mais aucun d’entre eux n’avait jusque là réussi à se faire entendre de la justice. Et encore moins de l’Eglise …ou si peu . On l’avait quand même relevé du ministère des aumôneries.
Les premiers signalements interviennent au début des années 2000. Un quadragénaire, que l’on appellera Jean-Marc, s’ouvre au Procureur de la République de l’époque, d’attouchements qu’il a subis étant enfant. Aucune réponse de la justice. Les faits sont prescrits.
La même année, c’est Paul qui, cette fois, alerte le diocèse pour les mêmes agissements. Devant l’évêque et la famille, l’abbé Peyrard confesse sa faute. Il est alors aumônier dans un collège de la Loire. Le diocèse lui retire sa charge. Il n’est plus en contact avec les jeunes.
En 2001, c’est le frère de Paul, nous l’appellerons Julien, qui déclare à son tour avoir été victime d’un viol. Il porte plainte mais très perturbé par ce qu’il a vécu, il n’ira pas à la confrontation prévue avec le prêtre . La plainte est classée sans suite. Pourtant les faits qu’il dénonce ne sont pas prescrits.
2004. Nouvelle plainte.Les parents de la victime informent le diocèse. La victime est confrontée au prêtre au commissariat.
Le procureur a mis 7 mois pour me répondre que les faits sont prescrits – Jean-François
De plaintes en signalements, le prêtre est donc relevé de ses fonctions et doit faire l’objet d’un suivi médical. Officiellement, on le tient à l’écart des jeunes mais il est encore de tous les pèlerinages, aux côtés d’adultes et de lycéens. L’actuel évêque de St Etienne expliquera plus tard qui’l n’avait plus de contact avec les jeunes.
En coulisses pourtant, la justice et l’Eglise s’interrogent. Faut -il l’interdire de tout déplacement ? Représente-t-il encore un danger pour son entourage? Peut-il encore céder à la tentation ? Non. Etranges conciliabules après des aveux circonstanciés. Il est décidé que la mesure d’éloignement des jeunes prise par l’Eglise suffira.
Quand j’ai su qu’il n’irait pas en prison, j’étais contrariée – Une victime –
Il faut attendre l’été 2017 pour que l’Eglise sorte de son silence. Le nouvel évêque de St Etienne Mgr Bataille révèle publiquement les accusations qui visent le prêtre. Mars 2018, soit huit mois plus tard : Le procureur de la République décide d’ouvrir une enquête préliminaire sur la base de l’ancienne plainte de 2001, toujours non prescrite. Mais d’enquête véritable, il n’y aura jamais eu dans cette affaire.
A leur sortie de la gendarmerie, les victimes sont partagées entre soulagement et colère. Le père Régis Peyrard devra bien répondre de ses actes devant un tribunal mais sans que toutes ses victimes aient pu être toutes entendues. Ce procès tardif pourrait bien les faire retomber dans l’oubli.
Les explications de Me Sannier sur la prescription dans les affaires de pédophilie :
L’enquête de Sylvie Cozzolino et Béatrice Tardy :
Source : Affaire Peyrard : un très long silence de cathédrale – France 3 Auvergne-Rhône-Alpes